Technique de l'assemblage : Pourquoi l'hydrogène fragilise les assemblages ? Observations sur la fragilisation par l’hydrogène
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La fragilisation par l’hydrogène reste un thème majeur dans le domaine de la technique d’assemblage. Elle fait l’objet de multiples discussions, entre autres au niveau de l’achat, de la vente et des clients. Mais peu savent vraiment ce qu’il en est.

De nombreux distributeurs d’éléments d’assemblage font apparaître la remarque « Attention : risque de fragilisation par l’hydrogène » ou un texte similaire pour certains articles proposés sur leur plateforme commerciale. Le présent article technique vise à éclairer le contexte et, surtout, les conséquences que cette fragilisation peut avoir dans le pire des cas pour le consommateur final.
Défaillance d’un composant due à la fragilisation par l’hydrogène
L’expression « fragilisation par l’hydrogène » (plus précisément, fissuration ou rupture de fragilisation induite par l’hydrogène) est un endommagement du matériau qui peut se produire suite à la diffusion d’hydrogène atomique dans ce matériau. Selon l’origine de l’hydrogène, on fait une distinction entre la fragilisation interne, due à la fabrication (en anglais : internal hydrogen ermbrittlement, IHE), et la fragilisation externe, due à l’environnement (en anglais : external hydrogen embrittlement, EHE). L’IHE se produit donc principalement avec des traitements de surface électrochimiques, comme le décapage acide, qui sert à nettoyer des surfaces, ainsi que par une précipitation électrolytique comme le zinc, l’alliage zinc-nickel ou zinc-fer. L’EHE vient en général d’une corrosion de surface formant comme produit dérivé de l’hydrogène, qui, pour sa part, peut se diffuser dans la structure du matériau. L’acier de haute résistance et les alliages d’aluminium ou le titane sont exposés à l’IHE et l’EHE.
À noter aussi que la quantité d’hydrogène absorbée par les éléments d’assemblage lors du processus électrolytique dépend de nombreux facteurs, comme la durée du revêtement, le procédé au tambour ou sur support, ou la densité du courant. De plus, les revêtements en zinc-nickel sont bien moins sensibles à l’IHE que, par exemple, des revêtements 100 % constitués de zinc, étant donné que l’alliage zinc-nickel constitue une couche nettement plus perméable pour l’hydrogène effusé.
Pour qu’un composant présente une défaillance due à une fragilisation par l’hydrogène, les trois conditions suivantes doivent toujours être remplies (voir l’illustration a) :
- État de matériau favorisant la fragilisation – haute résistance à la traction ou dureté
- Contrainte de traction
- Hydrogène atomique
Uniquement si ces trois conditions sont remplies dans une mesure suffisante, une fissuration donnant lieu à un accroissement des fissures et pour finir à une rupture, peut avoir lieu. Ce qui est déterminant, c’est qu’une défaillance IHE est toujours un phénomène temporisé. Elle ne survient jamais directement lors du montage, mais en général quelques heures après. Les études les plus récentes montrent qu’une défaillance IHE se produit habituellement dans un délai de 72 heures après le montage. En outre, des éléments d’assemblage peuvent aussi se rompre s’ils sont sollicités bien en dessous de leur limite de contrainte admissible.
L’hydrogène provenant de processus électrochimiques peut se diffuser en profondeur dans la structure du matériau. Durant cette action, des atomes d’hydrogène s’accumulent dans des zones comportant des points énergétiquement favorables, tels qu’une contrainte de traction particulièrement élevée ou des défauts cristallins. Au fil du temps, la concentration d’hydrogène augmente dans ces parties, ce qui va de pair avec un affaiblissement de ces zones. Lorsque la combinaison critique de tension et de concentration d’hydrogène est atteinte, une rupture survient. Les caractéristiques principales d’une rupture IHE sont le comportement à la rupture intercristalline, les joints de grains béants et les craquelures triangulaires sur les surfaces de grain.
Mesures contre la fragilisation par l’hydrogène
Une mesure simple et efficace pour empêcher la fragilisation par l’hydrogène est d’éviter le décapage à l’acide et de nettoyer plutôt les incrustations, la rouille et d’autres couches d’oxyde avec des substances alcalines ou mécaniquement. Si cela n’est pas rentable, il convient d’utiliser systématiquement un décapant à inhibiteurs. Une deuxième mesure essentielle est de renoncer au zingage électrolytique et de privilégier les revêtements de zinc lamellaires ou les zingages mécaniques. Si ces mesures sont impossibles à réaliser, on applique la malléabilisation pour les matériaux sensibles. La malléabilisation est un traitement thermique basé sur la température et le temps, visant à extraire l’hydrogène qui a pénétré dans la structure. Ce processus est désigné par effusion par opposition à la diffusion.
L’efficacité de la malléabilisation dépend de la température, de la durée, ainsi que de l’épaisseur et de la perméabilité du revêtement. Contrairement à des recommandations antérieures prévoyant une malléabilisation d’environ 4 heures à 190 °C, il est aujourd’hui conseillé de l’effectuer pendant au moins 8 à 10 heures à une température entre 190 °C et 220 °C. De plus, lors de la malléabilisation, il faut veiller à ce que la température ne dépasse pas la température de revenu initiale des éléments d’assemblage, et à ce que la performance du revêtement en matière de protection anticorrosion, de plage de coefficient de friction, etc., ne soit pas restreinte.
L’intervalle de temps entre le revêtement électrolytique et le début de la malléabilisation est également déterminant pour une malléabilisation réussie. Plus cet intervalle est court, moins l’hydrogène a le temps de pénétrer dans la structure. On recommande actuellement une plage de temps de 4 heures au maximum. De nombreuses entreprises de revêtement de surface appliquent cependant un intervalle de seulement une heure. Comme expliqué plus haut, la précipitation électrolytique, de même que la dureté, ont aussi une influence sur la durée de malléabilisation nécessaire. La norme DIN EN ISO 19598 prescrit par exemple une durée de malléabilisation de 24 heures pour une résistance à la traction de 2'000 N/mm2 du matériau.
Classes de résistance/de dureté exposées à la fragilisation pour les éléments d’assemblage
La norme DIN EN ISO 4042 fournit des indications claires sur les classes de dureté, de résistance d’éléments d’assemblage exposées à la fragilisation par l’hydrogène. Pendant longtemps, on considérait qu’une dureté de 320 HV était le seuil de risque de fragilisation. Des études récentes montrent cependant que le risque IHE se présente pour une dureté supérieure ou égale à 360 HV et qu’une vérification de processus complémentaire et/ ou une malléabilisation n’est nécessaire qu’à partir de cette valeur. Pour les éléments d’assemblage caractérisés par une dureté d’au moins 360 HV à 390 HV, aucune malléabilisation n’est par exemple nécessaire si l’on réalise une vérification de processus et/ou un essai de produit complémentaire en relation avec l’IHE. Les éléments d’assemblage d’une dureté supérieure à 390 HV doivent faire l’objet d’une malléabilisation.
Pour les éléments d’assemblage conformes à ISO 898-1, ISO 898-2 et ISO 898-3, de même que pour les vis traitées par trempe et revenu, telles que les vis à tôle, les vis autotaraudeuses et autoperceuses, la norme ISO 4042 fournit également des consignes concrètes en matière de vérification de processus, d’essai de produit et d’application ou non de la malléabilisation. Ainsi, il faut par exemple malléabiliser les vis de la classe de résistance 12.9. La précipitation zinc-nickel alcaline avec une teneur en nickel de 12% à 16% peut constituer une exception si le fournisseur et le client en conviennent. Les vis traitées par trempe et revenu – à l’exception des vis à tôle et des vis conçues pour des matériaux tendres – doivent être soumises à partir d’une dureté à cœur > 370 HV à une vérification de processus et à un essai de produit en relation avec l’IHE, et être malléabilisées. Pour obtenir des informations plus complètes à ce sujet, il faut consulter la norme ISO 4042:2018-11.
Méthodes d’essai possibles pour la détection d’une fragilisation par l’hydrogène
La méthode d’essai la plus courante pour détecter la fragilisation par l’hydrogène est l’essai de déformation selon la norme DIN EN ISO 15330. Dans le cadre de cet essai, on soumet les éléments d’assemblage à une charge correspondant à la limite d’élasticité, au couple de rupture. Cet état doit être conservé pendant au moins 48 heures, avec un réajustement de la charge au bout de 24 heures à cause du tassement. En même temps, on vérifie si des ruptures se sont produites du fait de la fragilisation. D’autres méthodes d’essai normalisées sont décrites dans les normes DIN 50969-2, NASM 1312-2 et ASTM F606 / F606M.
Récapitulatif Le phénomène de la fragilisation par l’hydrogène a entre temps fait l’objet de recherches approfondies, et il existe des études complètes formulant des recommandations sur la manière d’éviter cette fragilisation dès la phase de fabrication. S’il est impossible d’exclure une fragilisation pendant la fabrication, on peut en grande partie l’éliminer à l’aide d’un traitement thermique défini, à savoir la malléabilisation. De nombreuses études effectuées par des ingénieurs en matériaux et spécialistes de la fragilisation par l’hydrogène montrent clairement qu’une fragilisation IHE peut être pratiquement exclue si le traitement préliminaire, le revêtement et le processus de malléabilisation sont corrects et bien ajustés, et ce même avec des éléments d’assemblage de haute résistance comme les vis 12.9, selon la norme ISO 898-1. Mais il n’y a pas garantie à 100 %. Aussi, les composants de haute résistance ayant une incidence sur la sécurité sont le plus souvent revêtus de lamelles de zinc, galvanisés à chaud ou mécaniquement, étant donné que ces procédés de revêtement ne produisent pas d’hydrogène et excluent par conséquent une fragilisation par l’hydrogène. Pour éviter tout effet de corrosion, il faut utiliser des éléments de fixation inoxydables pour les applications en extérieur. MSM
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